Un habitant du Loiret a été trouvé en possession de 18.000 € en espèces sur une aire d’autoroute, à Janville. Les gendarmes affirment qu’il s’agit de l’argent de la drogue. La justice l’innocente.
L’homme, un Loirétain de 36 ans, comparaît libre, à la barre du tribunal de Chartres, quatre ans après un contrôle douanier sur une aire de l’autoroute A10, à hauteur de Janville-en-Beauce.
« Avez-vous quelque chose à déclarer ? », lui demandent les agents, le 27 septembre 2016. L’homme admet qu’il a une grosse somme d’argent liquide sur lui : « J’ai 12.000 €. Je vais acheter une voiture en Belgique. »
Il leur montre une boîte à gâteaux posée dans la voiture. Les douaniers y trouvent 18.000 €. L’homme bredouille : « C’est un ami qui m’a prêté une partie de l’argent. Il a dû se tromper de 6.000 €. » Selon lui, son frère lui aurait aussi prêté une partie de la somme.
Ses explications éveillent les soupçons des douaniers, qui se lancent dans une fouille en règle de la voiture. En soulevant les tapis de sol, ils trouvent une cache vide aménagée sous la voiture. Le suspect se défend : « C’est un ami qui m’a prêté la voiture. J’ignorais la présence de cette cache. »
De plus en plus suspicieux, les douaniers amènent leur chien spécialisé dans la détection des produits stupéfiants. L’animal marque les liasses de billets. « Ils ont été en contact avec de la drogue », écrivent les gendarmes dans leur rapport.
Pour eux, l’argent provient d’un trafic de stupéfiants, d’autant plus que l’homme refuse de leur livrer le nom de l’ami qui lui a prêté l’argent. « Il veut rester anonyme », assure-t-il, en octobre, à son procès, au tribunal de Chartres. Le problème, c’est que l’enquête n’a pas permis non plus de remonter jusqu’au propriétaire de la voiture. La perquisition chez le suspect, à Chécy (Loiret), a permis de découvrir 2.000 € supplémentaires en espèces. « C’est l’argent que ma femme a mis de côté », jure ce père de quatre enfants.
Me Ruben : « Vous avez dit huit fois “je pense”. Ici on ne pense pas, on sait ! »
Quatre ans plus tard, l’homme est jugé pour blanchiment lié à un trafic de stupéfiants. Il est en état de récidive. La peine s’annonce lourde, si sa culpabilité est démontrée.
Pour Nicolas N’Guyen, le procureur de la République, elle est évidente. « Plus c’est gros, plus ça passe », assure-t-il.
Il demande trois ans de prison ferme, avec placement immédiat en détention, et 5.000 € d’amende contre le prévenu. Lorsqu’il se lève pour plaider en défense, Me Steeve Rubens, du barreau de Paris, donne le ton. Connu pour ses plaidoiries tonitruantes, il s’en prend au procureur : « Vous avez dit huit fois “je pense”. Ici on ne pense pas, on sait ! » Il s’en prend, ensuite, aux enquêteurs. « Il n’y a eu aucune investigation sur les stupéfiants. Rien ne démontre l’existence d’un trafic », soutient-il.
Or, selon l’avocat, il ne peut y avoir de blanchiment s’il n’y a pas de trafic de stupéfiants. Loin de s’arrêter, Me Rubens enfonce le clou : « Les chiens ont marqué les billets et cela suffit aux enquêteurs. Il n’y a pas eu d’expertise des billets. C’est moi qui deviens fou ou il y a un problème ? »
Il demande la relaxe de son client, faute de preuves. Après six semaines de réflexion, les juges viennent de rendre leur délibéré. Le suspect est relaxé de toutes les charges qui pesaient sur lui. L’argent lui est restitué. Le parquet a fait appel de la décision.
Voir l’article : lechorepublicain.fr
- Date: 4 décembre 2020
- Titre: L’Echo républicain
- Auteur: Jacques Joannopoulos
- Photo: L’Echo républicain
- Catégorie: Articles de presse