Six personnes, dont deux mineurs, sont désormais mises en examen pour l’incendie criminel du Transilvania, en juin 2017 à Aubervilliers, où deux serveuses ont été brûlées vives. Le plus jeune suspect avait 16 ans.
Quelques billets pour incendier un bar. Un an après l’incendie criminel qui a brûlé vives deux serveuses d’un restaurant à Aubervilliers, c’est la glaçante hypothèse qui se dessine à travers l’enquête de la PJ.
Deux jeunes gens viennent d’être interpellés — ce qui porte à six le nombre de suspects — et placés en détention provisoire. Ils sont mis en examen pour assassinat en bande organisée et destruction par moyen dangereux. Le plus jeune avait seulement 16 ans au moment des faits.
Il est soupçonné d’avoir fait partie des trois incendiaires, originaires de La Courneuve, au soir du dimanche 11 juin 2017. C’était le premier tour des élections législatives, le restaurant de spécialités roumaines était encore ouvert lorsque les incendiaires ont surgi. Les rescapés ne sont pas les seuls à raconter l’inimaginable attaque, lors de laquelle la cuisinière elle-même a été aspergée d’essence.
Une vidéo de l’agression
Les enquêteurs de la PJ ont pu récupérer une vidéo de l’établissement, épargnée par le brasier. « Des images sans le son, d’une minute 30 au plus, d’une violence inouïe, qui montrent la froideur d’un passage à l’acte », relate une source proche de l’affaire.
Un rideau de flammes s’est dressé dans le restaurant, laissant peu de chance aux deux jeunes serveuses. D’autres clients, dont une enfant de 13 ans et son père Mikail, venus rendre visite à la cuisinière, sont parvenus à se barricader dans l’arrière-cuisine, en s’arrosant d’eau. Pris au piège entre les flammes qui léchaient la porte et une vitre barrée d’une grille, ils doivent leur survie à un voisin qui a défoncé la grille avec un marteau.
Les premiers soupçons se sont portés sans tarder sur un client du bar, âgé de 26 ans, et connu pour trafic de drogue. Il était au chevet des brûlées, extrêmement choqué, nous avaient confiés des proches des victimes, au lendemain des faits. Il avait été éconduit du restaurant les semaines précédentes, sa proximité avec les serveuses, notamment, n’aurait pas été au goût de tous.
A ce jour encore, c’est lui qui est supposé être le commanditaire du commando. Le mobile ? Récupérer le commerce ? Faire un exemple ? Plusieurs pistes sont toujours explorées. Il a été interpellé moins d’un mois après l’incendie, avec trois autres suspects, originaires de La Courneuve. Ils sont toujours écroués.
Un an d’enquête, d’écoutes, de témoignages et de gardes à vue, a conforté les enquêteurs de la PJ dans leur conviction sur la répartition des rôles : un commanditaire, un intermédiaire, un chauffeur et trois exécutants. Il leur manquait deux hommes, finalement interpellés la semaine dernière.
A La Courneuve, d’où sont originaires les présumés incendiaires, les langues se délieront-elles ? L’information sur un « recrutement dans le quartier pour incendier un bar » était en tout cas connue.
« Un gars d’Aubervilliers s’est pris la tête avec un patron de bar, sait un familier du quartier qui pensait à un acte d’intimidation. Il a voulu régler ses comptes, il est venu recruter des petits à La Courneuve. »
Lui a entendu parler d’un « contrat à 2000 € ». « On a déjà perdu des amis, dans le quartier, reprend-il, il y a eu des morts par balle mais là, cette affaire qui implique des petits de 16-17 ans dans un assassinat, ça dépasse tout. » S’ils n’avaient pas l’intention de tuer, pourquoi avoir incendié le bar, en journée avec des personnes à l’intérieur ?
Les suspects nient leur implication et leurs avocats, parmi lesquels Me Steeve Ruben, se refusent à tout commentaire.
Dominica, la jeune Moldave de 21 ans brûlée à 100 %, est morte après deux mois et demi de coma. Lydia, sa collègue de 19 ans, a survécu. Dans l’entourage du Transilvania, on explique qu’elle souffre de séquelles irréversibles et séjourne dans un centre de rééducation. Quant au papa de l’adolescente, il a subi plusieurs greffes de peau douloureuses.
Source : www.leparisien.fr
- Date: 5 juin 2018
- Titre: Le Parisien
- Auteur: Carole Sterlé
- Catégorie: Articles de presse